Conversation animée, dimanche 20 septembre à Paris, entre deux intellectuels israéliens sur la question palestinienne. Ames un brin déprimées en période automnale s’abstenir : le grand romancier A. B. Yehoshua et l’historien Elie Barnavi dressent un constat affligé.Les deux Israéliens étaient les invités de JCall, le réseau juif européen pour Israël et pour la paix…
A. B. Yehoshua parle le premier. Selon lui, le parti de Benjamin Netanyahu, le chef du gouvernement, est devenu un parti «d’extrême droite». Il est «peuplé de faucons» faisant passer pour des «modérés » ceux qui furent, un temps, les «princes» de cette formation, les «Benny Begin et autres Dan Meridor». En dépit des appellations différentes dont s’affuble un Parti travailliste en perpétuelle quête de renaissance, « il n’y a pas d’opposition». Vieux de 130 ans, le conflit avec les Palestiniens a résisté à toutes les tentatives de solutions – négociées ou autres… Yehoshua dit se résoudre à «réfléchir» à ce que pourrait être un Etat bi-national ou à une structure juridique de type confédérale, à laquelle la Jordanie serait partie prenante. Aveu de désarroi ou hypothèse sérieuse ?
« Réfléchir à un Etat bi-national est un exercice futile », lui répond Barnavi, ancien Ambassadeur à Paris. « Ce serait quoi d’ailleurs ? » Ensemble, Palestiniens israéliens et des territoires seraient majoritaires dans cet Etat. Corollaire de cette réalité démographique : si les juifs veulent y garder la majorité politique, l’Etat unitaire ne sera pas démocratique. «Un cauchemar», conclut l’historien, et, dans un cas comme dans l’autre, ce serait la trahison du projet sioniste : Israël en tant qu’Etat – majoritairement – juif et démocratique.
Barnavi, dont la collection Champs/histoire chez Flammarion vient de ré-éditer l’incontournable « Israël, un portrait historique » (448 p., 8,99 €), stigmatise « la malédiction de l’’occupation» – pour les Palestiniens d’abord et avant tout, mais pour les Israéliens aussi, puisqu’elle mine leur société de l’intérieur et érode la légitimité de leur Etat à l’extérieur.
Pour autant, faut-il imputer à la seule « occupation’ l’éternel échec des négociations israélo-palestiniennes ?
Sans doute doit-on compter avec les faiblesses, les contradictions et les divisions du mouvement national palestinien. Mais il y a autre chose à l’œuvre : un mélange complexe d’héritage de l’histoire – le rejet arabe du plan de partage onusien de 1948 puis la guerre qui s’ensuivit – et d’évolution plus récente de l’Etat israélien lui-même…