Rapprochement Israël-Turquie : Causes et Effets

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La poussière est à peine retombée après le passage du président Obama dans les Territoires palestiniens et en Israël, que déjà se pose la question du bilan de sa visite (voir l’article de David Chemla en « une » de notre site). L’hôte de la Maison Blanche n’avait rien promis : « pas de nouveau plan et pas de nouvelle méthode pour relancer le processus de paix ». C’est maintenant  à John Kerry, le Secrétaire d’Etat U.S. de s’atteler au « job » pour parvenir à des résultats…

Mais, néanmoins, avant de partir Obama a voulu laisser une pierre blanche sur son chemin. Cela s’est concrétisé par l’annonce de la reprise du dialogue entre la Turquie et Israël. Les excuses présentées  par Benyamin Netanyahou, premier ministre de l’état hébreu, à son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, en présence du président américain, ont été parfaitement mises en scène et les conditions de l’échange téléphonique, entre les trois responsables politiques, ont été largement médiatisées. C’est donc sur l’annonce d’une bonne nouvelle que « Air Force One » a pu quitter les rivages de la Méditerranée.

 L’information est d’importance, elle a été largement commentée en Israël comme en Turquie et ce d’autant que l’on ne s’y attendait pas. Certes, ce n’est pas demain que l’on verra la coopération stratégique reprendre entre les deux pays comme dans les années 1990. Mais, le contact diplomatique est renoué et les discutions reprennent.  

Reste à comprendre pourquoi ce soudain rapprochement après des années de profondes dissensions qui ont culminé lors de la tragédie de 2010, année de l’abordage par l’armée israélienne du navire  « Marmara », bateau turc affrété par des ONG pro-palestiniennes qui entendaient rompre le blocus maritime de Gaza. Reste aussi à évaluer quelles seront les retombées positives de ce rapprochement alors que le Moyen-Orient tangue dangereusement de la Tunisie jusqu’au Yémen… 

Ci-dessous, nous vous proposons, en quelques phrases et en quelques liens Internet, des sources intéressantes qui vous aideront à approfondir ce sujet complexe. Il est, à la fois, de nature  politique, militaire et économique. 

 

Revue de presse des  journaux israéliens et publication de l’ambassade de France à Tel-Aviv

Dans un communiqué, Benyamin Netanyahou a exprimé ses « regrets » à propos de la    détérioration des relations bilatérales et fait part de son « engagement » à dépasser les désaccords pour « promouvoir la paix et la sécurité régionale ». Le Premier ministre a présenté ses excuses au peuple turc « pour toute erreur ayant pu conduire à la perte de vies » et accepté d’indemniser les familles des victimes. Il a en outre reconnu que la dégradation de la situation en Syrie avait été un «facteur crucial » dans cette décision. « Il est important que la Turquie et Israël, des pays limitrophes  de la Syrie, puissent se parler. Cela est aussi souhaitable pour d’autres défis régionaux », a-t-il affirmé.

Cliquer pour lire le texte complet du communiqué

Dans un entretien accordé à « CNN Türk », le président Shimon Peres, a de son côté estimé que Jérusalem et Ankara avaient « mille raisons » d’être amis et pas « une seule » de ne pas l’être.

Le chef d’état major israélien, le général Benny Gantz, a lui aussi apporté son soutien à la décision du Premier ministre. « Netanyahou a bien fait et a agi pour faire progresser nos intérêts. Normaliser nos relations avec la Turquie permettra d’avoir une influence positive sur notre habilité à gérer les futurs défis qui nous attendent, d’un point de vue stratégique comme sécuritaire », a-t-il assuré.

Depuis les bancs de l’opposition, la chef de file du parti travailliste, Shelly Yachimovitch, a également « salué les     excuses », ajoutant qu’ « il vaut mieux ravaler sa fierté et faire ce qui est bon pour l’Etat ». Par ailleurs, les journaux saluent l’effort de médiation du Secrétaire d’Etat américain John Kerry. Ce dernier a estimé que la réconciliation« contribuera au progrès de la paix et de la stabilité dans la région ».

Pour le quotidien à grand tirage Yédiot Aharonot, «si Erdogan a assoupli ses positions, ce n’est pas à cause de Kerry mais à cause d’Assad ». Car selon les journaux, Israël, la Turquie et les Etats-Unis sont très inquiets de la possibilité que l’arsenal syrien, notamment les armes chimiques, ne tombe aux mains du Hezbollah ou de mouvements djihadistes. Dans le journal Haaretz, Alon Liel, ancien ambassadeur d’Israël en Turquie, estime que « les pourparlers de réconciliation entre les deux pays débuteront par l’évaluation du montant des compensations (pour les neuf morts du navire Marmara) mais s’élargiront très rapidement à l’Iran, la Syrie et les nouveaux gisements de gaz naturel ». Au cours d’une interview dans « The times of Israël », Zeev Elkin, secrétaire d’état au affaires étrangères, reconnait que « les relations entre les deux pays ne seront plus les mêmes… La Turquie a des ambitions géopolitiques dans notre région et sa position vis-à-vis d’Israël est influencée par cette idée ».

Ainsi, l’euphorie des premiers jours a laissé place à un certain scepticisme des commentateurs après la série de préalables exigés par Ankara pour entériner la normalisation des relations. Le montant des compensations qu’Israël doit  verser aux familles des victimes est notamment l’une des pommes de discorde entre Jérusalem et Ankara.  Le ministre de l’Economie et du commerce, Naftali Bennet (Ha beit hayéoudi)  a estimé que depuis qu’Israël avait présenté ses excuses,  le premier ministre turc faisait « tout pour qu’Israël les regrette, en lançant une campagne personnelle au vitriol sur les relations entre la Turquie et Israël ». Avigdor Lieberman (Israël Beiténou), l’ancien ministre des affaires étrangères de Netanyahou, partage l’analyse de Bennet et l’a fait savoir.

Diverses analyses sur les raisons et les retombées de la reprise des relations entre Israël et  la Turquie.

« Aujourd’hui, nous devons reconnaître que des maladresses et des bévues ont été commises et il était temps de pallier sa faute. Un Etat se respecte dans la dignité et grâce à sa force de dissuasion, mais devrait aussi surmonter des  crises diplomatiques avec sagesse, sang froid, et pragmatisme. Netanyahu a bien géré la crise avec Ankara en adoptant un profil bas et en agissant dans les coulisses et loin des projecteurs. »

Cliquer  pour connaître un point de vue« officieux », celui de Freddy Eytan du CAPE (en français)  

 

« Ici en Turquie, les excuses présentées ont été bien reçues et interprétées comme une victoire diplomatique du gouvernement. Il faut aussi noter que les deux pays sont pareillement inquiets de la sanglante guerre  civile qui se poursuit en Syrie et de l’influence croissante de l’Iran dans la région.»

Cliquer pour connaître le point de vue d’un journaliste turc, spécialiste reconnu  du Moyen-Orient (en anglais)

 

« Les relations des deux pays ont souffert, pendant trois ans, des politiques intérieures et des égos déguisés en fierté nationale. Alors, les troubles en Syrie, le programme nucléaire iranien et les pressions américaines ont eu raison de l’intransigeance des premiers ministres israélien et turc. Une nouvelle ère de collaboration s’annonce pour le bien de ces deux pays mais surtout pour l’intérêt stratégique des États-Unis et de l’Otan. »

Cliquer pour connaître la nouvelle stratégie d’Ankara, présentée  par Jacques Benillouche, journaliste israélien indépendant (en français)

 

« Pour autant, les relations israélo-turques ne connaîtront sans doute pas de sitôt un nouvel âge d’or à l’avènement duquel le ministre israélien de la Défense Ehud Barak avait largement contribué en 1996 avec la signature de deux accords de coopération militaire et l’autorisation pour l’aviation israélienne de s’entraîner dans l’espace aérien turc. »

Cliquer pour connaître l’analyse documentée d’Ariane Bozon, journaliste à « Slate.fr » (en français) 

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