CHRONIQUES POUR LA PAIX : SIMON EPSTEIN répond aux questions de PAUL OUZI MEYERSON suite au scandale et à la large mobilisation provoqués par la proposition gouvernementale de nommer Ephraïm Etam (Eiffi Etam) comme prochain président de YAD VACHEM. Pourquoi la candidature de cet ancien général de Tsahal et politicien nationaliste-religieux suscite-t-elle une telle levée de bouclier en Israël et par le monde ? En ce moment une pétition contre cette nomination circule, elle a remporté un grand succès international : près de 1000 universitaires, intellectuels, écrivains concernés par la SHOAH l’ont signée. En plus, plusieurs manifestations ont eu lieu, notamment celle de rescapés de la SHOAH.
SIMON EPSTEIN est historien, il a enseigné à l’Université Hébraïque de Jérusalem. Il est l’auteur de plusieurs livres sur le peuple juif, l’antisémitisme européen et la politique en Israël. Son dernier ouvrage, publié aux éditions Stock, s’intitule : «1930, une année dans l’histoire du peuple juif».
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Pour Simon Epstein, Yad Vachem joue un rôle très important au sein de l’Etat d’Israël : » L’institution a développé un enseignement de l’histoire de la Shoah d’une grande qualité. C’est à la fois un centre de formation populaire mais également un pôle de recherche de très haut niveau sur la destruction du judaïsme européen. C’est pour cela que Yad Vachem doit être géré au mieux ».
L’historien relève qu’Eiffi Eitam est un ancien militaire et un politicien de l’extrême-droite nationale religieuse qui a eu des propos racistes inacceptables à plusieurs reprises contre les arabes israéliens et palestiniens. Il tient à préciser que « même si celui-ci n’est pas un professionnel du racisme comme peuvent l’être les kahanistes, ses propos xénophobes le disqualifient pour la fonction de président de Yad Vachem ». Simon Epstein note également qu’Eiffi Eitam n’a pas de compétence particulière dans l’étude de la Shoah : « il n’a rien écrit, rien fait de spécial au cours de son existence pour justifier d’un savoir particulier dans ce domaine ». Il regrette profondément que la présentation de la candidature d’Eiffi Etam par le gouvernement Netanyahou ait été accompagnée d’une campagne de dénigrement de l’institution en provenance de l’extrême-droite israélienne : « on a présenté Yad Vachem comme un repaire de « gauchistes » qu’Effi Eitam aurait l’occasion de rééduquer, c’est démentiel ! ».
Simon Epstein rappelle que la force de Yad Vachem c’est d’avoir su trouver l’équilibre « entre une conception universaliste de la Shoah et sa signification nationale et juive ». L’institution de Jérusalem a su aussi faire cohabiter des approches séculaires et religieuses de la Shoah : « des hommes comme Yossef Burg (1) ou le Rav Lau, (2) ont occupé une place prépondérante à Yad Vachem ». Afin de perpétuer ces équilibres vitaux, l’historien pense que pour diriger Yad Vachem il faut « un homme qui suscite le soutien unanime ; quelqu’un qui ait un lien direct avec la martyrologie juive ; un esprit qui ait montré sa capacité de réflexion et d’approfondissement de l’histoire de la Shoah à travers des publications et des travaux ; une personne capable de transmettre des valeurs humanistes ».
(1) Yossef BURG : Rabbin, fondateur du Parti national religieux, membre de la Knesset (zal).
(2) Israel Meïr LAU : Ancien grand rabbin eschénaze d’Israël, déporté enfant à Buchenwald.