Diviser les Etats-Unis sur Israël par Isaac Herzog (New York Times)

Facebook
Twitter

 

JERUSALEM – Mon père, Haïm Herzog, a été le premier à se rendre à Washington pour aider à l’ouverture de l’ambassade d’Israël. Tout au long de son existence, il s’est consacré à l’alliance entre l’Amérique et Israël et il a fait tout son possible – en tant que général, diplomate et Président de l’Etat – pour maintenir des liens profonds entre l’Etat juif démocratique et les Etats-Unis.

Il avait réalisé que la relation profonde entre les deux pays n’était pas seulement basée sur d’importants intérêts stratégiques mais également sur le partage de valeurs communes. Il savait aussi qu’Israël devait être reconnaissant à l’Amérique, restée fidèle à nos cotés depuis le moment où Israël est né, et que le soutien des Etats-Unis à Israël devait toujours demeurer une affaire américaine non partisane. Nous les israéliens devons être alliés avec tous les américains, nous devons rechercher leur soutien tout en leur offrant un partenariat sincère, profond et amical.

Depuis que je suis le principal adversaire de Benjamin Netanyahou pour les élections israéliennes de 2015, je me suis efforcé de maintenir une approche bipartisane, comme mon père et les fondateurs de l’Etat d’Israël l’ont fait – par exemple : David Ben Gourion, Levi Eschkol, Golda Meïr, Itsrak Rabin, Menachem Begin et Shimon Péres.

Pour ces raisons, je pense très sincèrement que l’intervention, la semaine prochaine, de Monsieur Netanyahou devant le Congrès américain, contrôlé par le parti Républicain – une invitation qu’il a accepté sans consulter le Président démocrate des Etats-Unis – est une erreur majeure et grave. Agissant ainsi, il ne peut qu’entamer la capacité d’Israël à influencer la question cruciale d’obtenir une garantie véritable pour que l’Iran ne puisse jamais accéder à l’arme nucléaire. C’est ce résultat qu’Israël doit rechercher absolument, mais il ne pourra l’obtenir que grâce à un dialogue approfondi et de confiance avec l’administration américaine, un dialogue basé sur une approche bipartisane.

Moi aussi je suis inquiet de la possibilité que les diplomates américains soient tentés d’accepter des garanties insuffisantes au détriment de notre sécurité. Mais cette inquiétude doit être exprimée directement sans que nous intervenions dans les affaires politiques internes des Etats-Unis ; une telle approche respectueuse favorisera davantage un dialogue constructif pour trouver la bonne solution avec nos interlocuteurs américains. Nous n’aurions jamais dû atteindre une situation où la conseillère nationale du Président Obama pour les affaires de sécurité nationale, Susan E. Rice, soit amenée à déclarer que le Premier ministre israélien a fait quelque chose de « destructeur pour la pérennité de notre partenariat ».

Au lieu de créer la fausse impression que notre intérêt est lié à un seul parti américain ou un groupe de pression particulier, nous devrions tendre la main à tous les américains – démocrates et républicains, libéraux et conservateurs, faucons et colombes. Après tout, Israël n’est pas seulement un allié stratégique dans un Moyen-Orient en crise, mais également un allié de nature démocratique qui respecte les valeurs sur lesquelles les Etats-Unis se sont construits et qu’ils ont l’obligation historique de défendre : liberté, droits de l’homme et recherche de la paix. Face à des horreurs telles que l’Etat Islamique et la catastrophe humanitaire en Syrie, Israël est un oasis de liberté qu’il a le droit et le devoir de préserver. Mais, il faut toujours se rappeler la dette morale que l’on a contractée auprès de son aîné lorsque celui-ci est resté fidèlement à vos côtés pendant un demi-siècle.

Les américains aussi doivent comprendre un point précis concernant notre turbulente démocratie. Malgré mon désaccord profond avec Monsieur Netanyahou sur de nombreuses questions – le processus de paix, la politique des implantations, la justice sociale et son prochain discours aux membres du Congrès U.S. – sur une chose il n’y a pas de différence entre nous : la sécurité d’Israël. Aucun chef de gouvernement israélien ne peut tolérer que des missiles envoyés par des terroristes pleuvent sur nos enfants. Aucun chef de gouvernement israélien ne peut rester aveugle aux dangers qui se présentent dans le nouveau Moyen-Orient en plein chaos et empli de violence. Aucun chef de gouvernement israélien ne pourra jamais tolérer un Iran nucléarisé.

Et notamment sur la menace nucléaire iranienne, les israéliens sont unis. Nous savons que la théocratie de Téhéran combine une ambition hégémonique et un désir de développement nucléaire qui posent un danger stratégique à notre petit pays.

Mais un Iran ayant l’arme nucléaire ne menacera pas seulement Israël. Si les iraniens l’obtiennent, tout le Moyen-Orient participera à cette course à l’armement ce qui mettra le monde entier en péril. C’est pourquoi le danger nucléaire iranien ne doit pas être conçu comme l’obsession de Monsieur Netanyahou ou une simple question partisane, mais essentiellement comme un sujet qui concerne l’ensemble de la communauté internationale.

Ainsi, mes compatriotes sont rejoints par de nombreux arabes qui sont également préoccupés par les centrifugeuses tournant dans les centrales de Natanz et Fordow. Les israéliens et les arabes vivent au Moyen-Orient et connaissent la région. Faisant face à un Iran menaçant et aux périls que pose la montée du radicalisme islamique, nous sommes amenés à travailler ensemble pour stabiliser la région et l’ouvrir à un futur meilleur. Quand des israéliens, saoudiens, égyptiens, jordaniens et d’autres personnes raisonnables entendent la même sonnette d’alarme concernant l’Iran, je suis pour soutenir un effort diplomatique qui bloque efficacement le chemin de ce pays vers la bombe. Mais cet effort doit mettre toutes les options sur la table, il faut refuser à l’Iran le droit de mener des politiques de déstabilisation régionale et d’aide au terrorisme, il faut qu’une demande internationale soit faite afin que l’Iran cesse ses menaces visant l’existence de l’Etat d’Israël.

Voilà mon plaidoyer : à nous tous de relever le défi iranien. L’Iran n’est pas uniquement un danger pour Israël et nous ne devons pas en faire une question partisane. L’Iran est un problème international explosif que les nations du monde doivent désamorcer.

En tant qu’israélien et citoyen du monde libre qui a toujours cru au « leadership » américain, j’espère que les Etats-Unis mettront en place, une fois encore, une diplomatie affirmée, audacieuse et créative. Travaillons ensemble comme de proches alliés pour garantir l’avenir de nos enfants.

Contribution éditoriale publiée dans le NEW YORK TIMES du 27 février 2015 (cliquer pour lire l’original en anglais)

ISAAC HERZOG est le Secrétaire général du Parti travailliste israélien, également tête de liste pour l’Union Sioniste qui s’oppose au Likoud de Benjamin Netanyahou. L’Union Sioniste (composée du Parti travailliste et de la formation de Tsipi Livni) est créditée, par les instituts de sondage, du meilleur score pour les prochaines élections à la Knesset (17 mars 2015).

Traduction Paul Ouzi MEYERSON

Facebook
Twitter

Tribune Libre

Agenda

Atlas du conflit Israélo-Arabe

Communiqué

Facebook

Newsletter