Meïr Waintrater
Article paru dans Planète Paix (mensuel du Mouvement de la Paix), janvier 2013.
Le représentant de la France, Gérard Araud, déclarait le 29 novembre 2012 devant l’Assemblée générale des Nations Unies: «En votant aujourd’hui pour la reconnaissance de la Palestine comme Etat non membre observateur de cette organisation, la France a voté en faveur de la solution des deux Etats, de deux Etats pour deux peuples, Israël et la Palestine, vivant, côte à côte, en paix et en sécurité, à l’intérieur de frontières sûres et internationalement reconnues». M. Araud appelait les deux parties à «retourner à la table des négociations immédiatement et sans pré-conditions», et il soulignait: «La reconnaissance internationale qu’accorde aujourd’hui cette Assemblée au projet étatique palestinien ne pourra se traduire dans les faits que par un accord, fruit de la négociation entre les deux parties sur l’ensemble des questions du statut final dans le cadre d’un règlement de paix juste et global».
Ces propos résument parfaitement ce qui est dans la résolution du 29 novembre dernier, et ce qui n’y est pas. Ce qui y est: l’affirmation simultanée du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et de la nécessité d’un accord de paix israélo-palestinien. Ce qui n’y est pas: une relance concrète du processus de paix. Tout a été dit au plan des principes, tout reste à faire dans la réalité.
Avant le vote de l’Assemblée générale, on annonçait que le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, s’apprêtait à proposer au premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, une reprise des négociations sans pré-conditions. Mais cela ne s’est pas produit. Au contraire, la direction palestinienne a réitéré l’exigence d’un arrêt total des constructions israéliennes à Jérusalem-est et en Cisjordanie comme préalable à la reprise des négociations. Il est vrai que les projets de construction dans ces mêmes territoires, annoncés par le gouvernement israélien au lendemain du vote de New York, n’ont pas contribué à calmer les esprits. Il est vrai aussi que l’époque est propice aux surenchères: élections législatives puis formation d’un nouveau gouvernement en Israël, concurrence exacerbée entre le Hamas et le Fatah chez les Palestiniens. La relance du processus de paix reste envisageable dans les mois à venir, mais le temps presse car toute action unilatérale, venant de l’une ou l’autre des deux parties, risque de mettre le feu aux poudres.
Les éléments d’un accord sont connus de longue date. Ils ont été décrits de manière très précise, dès la fin de l’année 2003, par un groupe d’Israéliens et de Palestiniens ayant exercé de hautes responsabilités dans leurs sociétés respectives [1]. Ce projet n’a rien perdu de son actualité. Tous les sondages montrent que la majorité des Israéliens et la majorité des Palestiniens se prononcent pour la coexistence de deux Etats. Il suffit d’une vraie volonté politique chez les dirigeants israéliens et palestiniens, avec une action internationale concertée, pour qu’une reprise des négociations débouche enfin sur un accord de paix.
Les Palestiniens ont le droit d’être libérés de l’occupation israélienne et d’exercer leur souveraineté nationale dans un État indépendant et viable. Les Israéliens ont le droit de vivre en sécurité dans leur État, à l’abri des attentats terroristes et de la menace des armes de destruction massive. Il s’agit, dans les deux cas, de droits humains qui sont, par nature, non négociables. La négociation doit porter sur les conditions de leur mise en œuvre, afin d’édifier un avenir où l’État arabe de Palestine et l’État juif d’Israël coexisteront dans la paix et le respect mutuel.
NOTE
1. Le travail de ce groupe, connu sous le nom d’Initiative de Genève, a été soutenu en France par le collectif «Deux peuples, deux États», créé notamment par La Paix Maintenant et le Mouvement de la Paix. L’Initiative de Genève entretient un site Internet multilingue où on trouve le texte français du projet d’accord de paix israélo-palestinien (voir ici).