Notre ami Marc Lefèvre a répondu aux questions du blog « Le cri du peuple », qui est un site Internet personnel (celui de Nathanaël Uhl), proche des idées du Front de gauche.
Marc Lefèvre se définit comme sioniste de gauche. Il a été parmi les fondateurs, et porte-parole pendant plusieurs années, de « La Paix maintenant », organisation de soutien en France du mouvement « Shalom Archav » en Israël. Marc est également membre du bureau de JCall.
Dans cette interview, il revient sur les enjeux de la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza. Il remet en question la tolérance d’une partie de l’extrême gauche par rapport à l’antisémitisme des banlieues qui a montré sa violence à Sarcelles et lors de la manifestation interdite à Barbés (Paris). Voici quelques extraits de son entretien…
Alors qu’une nouvelle manifestation contre l’intervention militaire à Gaza a lieu ce soir (mercredi 23 juillet), tu as eu des propos assez durs sur les précédentes, notamment celles de ce week-end. Pourquoi ?
D’abord, la manifestation de ce 23 juillet n’a rien à voir avec les précédentes, celles du 13 et du 19. Pour une raison simple : elles ne sont pas organisées par les mêmes associations. Le rassemblement de ce soir est initié par les groupes démocratiques qui soutiennent les Palestiniens : l’Association France-Palestine solidarité, la CGT, le PCF… Des gens avec qui j’ai l’occasion de débattre fréquemment. Les manifestations précédentes étaient appelées par des réseaux islamistes, avec le concours des Indigènes de la République et un Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) en perte de repères. Les manifestations du 13 et du 19 juillet ont dégénéré parce qu’elles étaient à l’initiative de cette galaxie-là.
Je pense, plutôt, que les incidents sont consécutifs à l’interdiction décidée par le gouvernement…
Reprenons le fil des événements. Le 13 juillet, je suis de retour en France après avoir participé à un rassemblement pour la paix organisée en Israël par le quotidien Haaretz. Je passe place de la République où je vois la haine à l’état pur, où j’entends des slogans favorables au Hamas. Plus tard, un groupe d’excités cherche une synagogue à casser. Pour la première fois, parce que je suis juif, je me retrouve à raser les murs. Alors que j’ai passé ma vie à lutter contre les stéréotypes véhiculés par les sionistes de droite sur « la France antisémite », je me retrouve confronté à cette réalité. Le tout alors que je reviens d’un pays en guerre où l’assassinat d’un adolescent palestinien par des extrémistes israéliens a profondément ébranlé la société et la classe politique israéliennes. Ici, en France, nous voyons sous nos yeux la violence d’un islamisme politique radical, qui est un danger pour la démocratie. Et, parce qu’il y a eu ces incidents le 13 juillet, il était normal que la manifestation du 19, appelée par les mêmes groupes anti-démocratiques proches du Hamas, soit interdite.
Pourtant, nombre de partis de gauche ont condamné cette interdiction…
C’est ce que je reproche à la gauche de la gauche. Elle se cache derrière son petit doigt et rejette la responsabilité des violences sur la seule Ligue de Défense juive. Quand tu organises une manifestation, tu es responsable de son déroulement. Il faut aussi admettre que, dans le « camp palestinien », il y a des tendances et des divergences très fortes. Le Hamas est l’ennemi de la paix, il faut l’affaiblir militairement et le combattre politiquement pour qu’un jour une paix équitable soit établie. Or, une partie de la gauche en France, soit par culpabilisation post coloniale soit par une lecture sociale compatissante, ferme les yeux. Il y a, parmi les immigrés et les descendants d’immigrés, une tendance radicale, islamiste, qui combat la République, ses valeurs, ses principes, ses fondements et qui ne s’inscrit pas dans le débat démocratique. Il faut le reconnaitre et la combattre. Cette clarification politique est impérieuse. Il est fallacieux de vouloir chercher des excuses du types « victimes du système » pour expliquer, excuser ou justifier que certains soient sensibles aux mots d’ordre des réseaux islamistes et des organisations qui en sont plus ou moins complices. C’est faire injure à leur l’intelligence.
Qu’entends-tu par « clarification politique » ?
La lecture « sociologique » amène à l’irresponsabilité politique. Je n’excuserai JAMAIS pour quelque motif que ce soit, un prolétaire allemand qui a voté Hitler. Je ne vois pas pourquoi je serai plus indulgent pour un gamin des banlieues qui s’enrôle dans le Djihad ou qui vient semer la haine dans les rues de Paris et que je ne vois pas défiler contre les massacres en Syrie, en Irak, en Libye et ailleurs, du fait de son indignation sélective tournée uniquement contre Israël et par extension contre tous les Juifs ou qu’ils soient, y compris son commerçant de quartier. Il y a aussi une confusion, parce que l’analyse politique n’est pas menée jusqu’au bout, qui met toutes les organisations qui soutiennent le peuple palestinien sur un pied d’égalité. Moi je fais la différence entre les associations de soutien au peuple palestinien qui défendent une solution de Paix basée sur la création d’un Etat Palestinien à côté de l’état d’Israël, selon des termes et conditions à débattre, et les organisations qui s’alignent avec ceux qui nient le droit à l’existence d’un Etat d’Israël ayant la vocation d’accueillir tous les Juifs qui veulent y vivre pour bâtir leur avenir et continuer leur Histoire.
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