jean-Luc Allouche sur A.B. Yehoshua : « Comme un prophète de la Bible »

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-CHRONIQUES POUR LA PAIX –

Le 14 juin dernier, Abraham Bouli Yehoshua nous a quittés. Ecrivain et essayiste, il est l’auteur de plusieurs dizaines de livres, la plupart traduits en français et de nombreuses autres langues. Avec ses deux amis, Amos Oz (lui-même décédé en 2019) et David Grossman, on le considère comme l’un des trois géants de la littérature israélienne. Lauréat du prestigieux prix d’Israël en 1995, il avait reçu en 2012 le prix Médicis français du livre étranger pour « Rétrospective » paru chez Grasset. A travers ses romans, A.B. Yehoshua, a su mieux que tous les innombrables essais et écrits sur Israël, nous parler du peuple de ce pays, de ses angoisses et de son histoire. Il l’a fait avec lucidité, humour et empathie.

 A.B. Yehoshua s’est toujours affirmé comme sioniste, enraciné dans son pays et dans sa langue. Mais, cette identité s’est toujours accompagnée d’un engagement pour l’égalité des droits pour tous les habitants vivant entre le Jourdain et la Méditerranée. Son combat pour la justice n’avait d’égal que celui qu’il menait pour la paix. Compagnon, dès sa création, de Shalom Arshav (la Paix maintenant), A.B. Yehoshua a été l’un des signataires de l’Accord de Genève de 2003 qui, négocié par des représentants israéliens et palestiniens, définissait les paramètres politiques qui auraient dû mettre fin au conflit. Membre du Parti travailliste, puis du Meretz, il s’était engagé dans la plupart des combats de la gauche israélienne.

 Jean-Luc ALLOUCHE, le traducteur français d’A.B. YEHOSHUA, répond aux questions de Paul Ouzi MEYERSON pour nous raconter le grand écrivain qu’il connaissait bien. 

Jean-Luc ALLOUCHE a été journaliste puis rédacteur en chef à Libération pendant 15 ans, dont 5 années passées en Israël en tant que correspondant du journal. Il a traduit plusieurs grands auteurs israéliens.

 

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Jean-Luc Allouche se souvient qu’il a rencontré A.B. Yehoshua à de très nombreuses reprises. Il a été, très vite sensible à son humanité, à son humour ironique et à sa fougue. « C’était un homme qui avait une réelle empathie pour les autres, comment ne pas devenir son ami ? » souligne l’ancien rédacteur en chef du journal Libération. Et, de fait, pendant une longue période ils ont poursuivi un dialogue à la fois littéraire et politique, mais aussi un échange d’idées sur le monde Juif.

A.B.Yehochua

Jean-Luc Allouche, comme beaucoup d’autres, considère que A.B. Yehoshua est le meilleur conteur d’Israël . « Cela le classe dans la sainte trinité de la littérature hébraïque. Il avait une imagination débordante, un imaginaire beaucoup plus lyrique que celui d’Amos Oz ou que celui de David Grossman. Mais surtout, ses livres  se déroulent souvent en dehors d’Israël, partout dans le monde et à des époques différentes. Sa faculté d’animer des personnages de chair et de sang était à la limite de l’écriture poétique, cela le rapproche de Shaï Agnon, le prix Nobel de littérature », souligne notre traducteur.

Sans aucun doute A.B. Yehoshua était très profondément attaché à son pays et à son peuple. « Il était à l’image des fondateurs pionniers du pays, avec leur force et leur énergie. Il avait une histoire d’amour presque naïve avec le sionisme qui, par la suite, s’est transformée en un sentiment un peu désespéré. C’était un peu la même chose avec le judaïsme. Il pensait que pour être un juif entier, il fallait vivre en Israël. Mais attention ! il pratiquait trop l’humour et l’ironie pour être dogmatique, il écoutait », explique Jean-Luc Allouche.

Jean-Luc Allouche

Militant de la gauche sioniste, partisan de la solution « deux peuples pour deux États » ( un pour Israël, l’autre pour les palestiniens), A.B. Yehoshua, dans les dernières années de son existence, semble avoir perdu confiance dans cette promesse politique et s’être tourné vers la possibilité d’établir un état binational entre la Méditerranée et le Jourdain. Jean-Luc Allouche considère qu’il s’agissait essentiellement « d’une provocation, de se faire l’avocat du diable, de lancer un pavé dans la mare. L’écrivain voulait se dresser comme un prophète de la Bible : réveillez-vous le peuple, voyez ce qui se passe sous vos yeux ! Il se désespérait de l’emprise de la droite nationaliste religieuse sur Israël et du développement de la colonisation en Cisjordanie. Finalement, A.B. Yehoshua est intéressant car profondément humain, il faut donc le prendre comme un tout ». 

 

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