Une élection sans fin

Facebook
Twitter

On se souvient du film « Un jour sans fin » où le héros est condamné, chaque matin à son réveil, à revivre la même journée, lui seul se souvenant des évènements de la veille. C’est un peu la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui le public israélien. Il doit retourner aux urnes le 1er novembre, la cinquième fois en 3 ans, pour trancher entre deux blocs dont le rapport de force n’a pas fondamentalement changé d’une élection à l’autre. Mais alors que dans le film, le héros s’améliorait à chaque occurrence de la journée, pour finalement réussir à séduire la belle héroïne, ce n’est semble-t-il pas le cas en Israël où, selon les sondages, aucun des deux blocs, celui des « pro Bibi » comme celui des « anti Bibi » ne semble en mesure de l’emporter. Les partis en lice ont jusqu’au 15 septembre pour déposer leurs listes. On aura peut-être alors une meilleure vision de la campagne à venir, parce que le résultat se jouant à une voix près pour obtenir une majorité, le nombre de listes et leur constitution seront déterminants pour chacune d’entre elles pour réussir à mobiliser leur électorat.

C’est en effet là sans doute que se jouera cette élection. La droite et les partis religieux réussissant généralement à faire le plein de leurs voix, en sera-t-il de même pour les partis centristes et de gauche ? Le tour précédent avait conduit à la mise en place d’un « gouvernement du changement » parce qu’il a eu lieu après une année de mobilisation et de manifestations du camp des « anti Bibi » qui voulait écarter du pouvoir un candidat inculpé dans plusieurs affaires de corruption et d’abus de confiance. Un an de fonctionnement de ce gouvernement a eu comme effet, en pacifiant le débat politique, de démobiliser ce mouvement de contestation. Réussira-t-il en seulement quelques semaines, après la trêve traditionnelle des fêtes du mois de tichri (période allant du 25 septembre jour de Rosh Hashana au 18 octobre, jour de Sim’hat Torah) à retrouver l’élan du tour précédent ?

Le taux de participation des électeurs arabes est la seconde inconnue de ce cinquième tour. Plus il sera élevé, plus les chances de Netanyahou de réussir à obtenir le soutien de 61 députés s’amoindrissent. Pour l’instant les sondages indiquent une baisse dans les intentions de vote des citoyens arabes israéliens qui iraient voter à 40 % d’entre eux. Alors que le gouvernement sortant a fait plus pour le secteur arabe que tous les gouvernements précédents, en augmentant significativement les budgets qui lui sont alloués et en luttant contre la criminalité qui y sévit, il semble que cela ne soit pas suffisant pour pousser cet électorat à aller voter dans une proportion qui se rapprocherait de celle de l’électorat juif. Il est vrai que sur la question de l’occupation et de l’avenir des relations avec les Palestiniens, ce gouvernement s’est inscrit dans la continuité de ceux qui l’ont précédé. Certes, il a autorisé à plus de 15000 palestiniens de Gaza à venir travailler quotidiennement en Israël et la coopération entre certains des ministères palestiniens avec leurs homologues israéliens a été rétablie. Mais ces actions se sont inscrites dans le cadre de la volonté de ce gouvernement de mettre en place une meilleure gestion du conflit et non dans celui d’offrir une perspective politique aux Palestiniens. Et cette question sera, comme les fois précédentes, encore la grande absente de cette nouvelle campagne électorale ; ce qui explique le désintérêt d’une partie de l’électorat arabe qui reste sensible à la situation des Palestiniens dans les territoires occupés. La dégradation de la situation sécuritaire en Cisjordanie ces dernières semaines, qui a conduit à la multiplication d’arrestations de Palestiniens en Cisjordanie, est la conséquence du manque d’espoir sévissant au sein de la jeunesse palestinienne qui aspire à la fin de l’occupation.

Les 28 et 29 août 1400 personnes et délégués se sont retrouvés à Bâle pour commémorer le 125ème anniversaire du premier congrès sioniste mondial. Les discours se sont succédé pour saluer la vision de son fondateur, Théodore Herzl, et le chemin parcouru depuis. Mais les questions auxquelles le futur pays allait être confronté, que le journaliste viennois avait prévues et décrites dans son roman utopique Altneuland (« Nouveau pays ancien »), comme notamment celle du partage de la terre avec les Arabes ou celle de la conciliation du judaïsme et de la laïcité, ont soigneusement été évitées, comme elles le sont dans cette nouvelle campagne électorale. Et tant qu’Israël ne les affrontera pas et n’y répondra pas, il n’aura pas accompli pleinement la vision du fondateur du mouvement sioniste.

David Chemla

Facebook
Twitter

Tribune Libre

Agenda

Atlas du conflit Israélo-Arabe

Communiqué

Facebook

Newsletter