Année nouvelle, Conflits anciens

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Il est d’usage de souhaiter à Rosh Hashana, le nouvel an juif, que l’année qui s’achève parte avec ses malédictions et que celle qui débute arrive avec ses bénédictions !

Mais alors que cette nouvelle année commence, les malédictions de l’an dernier se poursuivent et on n’en voit pas la fin. 5784 restera dans l’histoire juive et celle d’Israël comme l’une des pires années que le pays ait connue depuis sa création. La journée du 7 octobre 2023, jour de la fête de Sim’hat Torah, qui marquait la fin du cycle annuel de lecture de la Torah, n’est toujours pas achevée un an après. Le massacre de près de 1200 civils et militaires effectué par le Hamas ce jour-là et la capture de plus de 250 otages, dont 101 sont toujours encore détenus dans les tunnels de Gaza, ont causé un traumatisme dont le pays ne s’est toujours pas relevé. La guerre qui s’en est suivie ne semble pas prête de s’achever.

Au sud d’abord, plus de 700 soldats sont tombés à ce jour et plusieurs dizaines de milliers de Palestiniens ont été tués – dont une bonne part de combattants du Hamas -, sans que l’on puisse entrevoir pour l’instant un accord qui, selon les autorités militaires israéliennes, serait le seul moyen de récupérer les otages encore en vie et les corps des morts, et de permettre l’établissement d’un cessez-le-feu dont les populations civiles ont tant besoin.

Au Nord ensuite où, après l’envoi par le Hezbollah d’une roquette en moyenne par heure depuis un an sur le territoire israélien – ce qui a contraint plus de 60000 civils à quitter leurs villes et kibboutzim situés à proximité de la frontière libanaise -, Israël s’est lancé dans une guerre contre ce mouvement islamiste, éliminant en quelques jours la direction de ce mouvement par une série d’opérations audacieuses. Cette intervention, soutenue par toute la population israélienne de la gauche à la droite, a permis déjà de trouver des quantités d’armes et des tunnels aménagés par le Hezbollah ainsi que les plans prévus pour envahir toutes les villes du Nord d’Israël jusqu’à Nahariya. Cependant pour éviter de tomber dans les erreurs des deux précédentes guerres menées au Liban, le gouvernement doit donner à cette opération un but politique pour éviter un retour d’une menace sur le Nord du pays. Et cette solution, comme au Sud d’ailleurs, devra passer par une coopération internationale. Ce que, pour des questions de politique intérieure, Netanyahou se refuse de faire pour éviter de perdre sa majorité à la Knesset qui conduirait à de nouvelles élections

Suite à l’élimination du dirigeant du Hamas, Ismaël Haniyeh, au cœur même de Téhéran, et celle de celui du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dans son bunker à Beyrouth, l’Iran a lancé le 1er octobre, pour la deuxième fois, une attaque d’envergure de 200 missiles sur Israël. Ce conflit, s’il devait s’étendre, est de loin le plus dangereux pour ses implications régionales et internationales.

A ces trois fronts, il faut en rajouter deux autres. Celui en Mer rouge contre les Houthis du Yémen qui ont réussi à plusieurs reprises à envoyer sur le territoire israélien des missiles fournis par les Iraniens et qui bloquent le trafic maritime sur une voie essentielle pour le commerce mondial. Et surtout celui en Cisjordanie où les risques d’une nouvelle intifada sont réels après la mort de plusieurs centaines de Palestiniens depuis un an – dont beaucoup de dirigeants locaux et de membres du Hamas, tués par l’armée ou parfois par des colons, dont les exactions à l’égard des civils palestiniens restent généralement impunies – et la poursuite continue de la colonisation.

On pourrait poursuivre cette liste de « malédictions » par la description de la situation en Israël où les partis de droite et d’extrême droite ont repris une partie du crédit qu’ils avaient perdu après le 7 octobre. Itamar Ben Gvir, le ministre de la sécurité intérieure, a poursuivi sa main mise sur la direction de la police du pays qui n’hésite plus à s’attaquer aux manifestants contre la politique du gouvernement chaque samedi. Bezalel Smotrich, le ministre des finances et de plus de facto le responsable, au sein du ministère de défense, de la colonisation, a continué à mener sa politique qui vise à remodeler la Cisjordanie et à rendre impossible la création d’un État palestinien ….

Pourtant à côté de cette liste de « malédictions », il y a quelques lueurs d’espoir qui peuvent présager de bénédictions à venir.

La première est d’abord la résilience de la société israélienne et sa capacité dès le 8 octobre à pallier les nombreux manques de l’ État par un volontariat admirable. Cette société n’a pas tardé à se mobiliser pour soutenir les familles des otages sans renoncer aux manifestations hebdomadaires malgré la guerre contre ce gouvernement.

L’autre signe très encourageant est la réaction des citoyens arabes israéliens qui dans leur majorité se sentent plus appartenir à l’ État qu’avant la guerre et condamnent les actions et l’idéologie du Hamas.

Enfin le dernier signe porteur d’espoir est la réaction des pays arabes voisins suite aux attaques iraniennes. Deux de ces pays en paix avec Israël, la Jordanie et les Émirats, ont participé à la coalition internationale qui, avec les aviations israélienne, américaine, britannique et sans doute française, a intercepté en avril dernier et le 1er octobre les centaines de missiles tirés par l’Iran sur Israël. L’Arabie saoudite a même contribué à cette défense en mettant ses radars à disposition de cette coalition.

Cette nouvelle année commence donc à la fois avec des craintes mais aussi avec des espoirs qui passent d’abord par un accord de cessez-le-feu à Gaza qui permettrait de récupérer les otages, puis de mettre en place une gestion civile à Gaza avec l’implication d’une forte coopération internationale. Celui-ci pourrait entrainer, maintenant qu’Israël a regagné, grâce à ses succès militaires et technologiques, sa force de dissuasion discréditée le 7 octobre, un accord plus global qui permettrait d’écarter les menaces sur sa frontière Nord. Celui-ci pourrait être enfin le prélude à des changements régionaux et peut-être même une reprise de négociations avec les Palestiniens pour essayer de mettre fin à ce conflit, maintenant qu’il a été mis au centre des préoccupations internationales. Un tel scénario nécessiterait évidemment des élections en Israël et la mise en place d’un autre gouvernement.

Tout cela semble un rêve aujourd’hui. Mais c’est bien le moment à Rosh Hashana de formuler des vœux et ce sont ceux que nous émettons pour le bien des peuples de la région.

Nous vous souhaitons nos meilleurs vœux à vous et à vos proches pour cette nouvelle année.

David Chemla

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