Comme la majorité des Juifs américains qui ont voté pour elle [1], nous aurions préféré l’élection d’Hillary Clinton à la Maison Blanche. Une semaine après, il nous est toujours difficile d’imaginer comment la première grande puissance du monde sera dirigée à l’avenir par un homme qui semble, au vu de ses déclarations de campagne, pour le moins imprévisible. Mais aux États-Unis, comme ailleurs, son discours, construit sur la peur et le rejet de l’autre, et qui s’adresse plus à l’émotion qu’à la raison, a convaincu une population tentée par le repli sur soi. La question que se posent maintenant tous les éditorialistes et les dirigeants du monde est de savoir si le président Trump tiendra les promesses du candidat Trump. Il est évidemment impossible d’y répondre, bien que depuis quelques jours le nouveau président tienne un discours plus modéré. La constitution de son équipe sera sans doute une première indication.
En Israël, la droite s’est tout de suite réjouie de ce résultat et des belles promesses faites par le candidat Trump, comme celle de déplacer l’ambassade des États-Unis à Jérusalem. Déjà des voix en son sein commencent à se faire entendre appelant à accélérer les programmes de colonisation qui avaient été mis en veilleuse par peur des critiques de l’administration d’Obama ou, tout simplement, à enterrer définitivement la solution des deux États. L’autre promesse du candidat Trump, espérée par Netanyahu, c’est la révision de l’accord sur le nucléaire iranien qui avait été soutenu, rappelons-le, par une majorité des Juifs américains et avec le soutien actif de JStreet. Une telle décision, si elle était prise, aurait sans doute le soutien des monarchies du golfe et des régimes autocrates musulmans, mais serait lourde de conséquences pour la région.
La question qui inquiète Netanyahu concerne l’hypothétique «legacy» qu’Obama pourrait laisser dans les deux derniers mois de son mandat sur le Proche-Orient. Fera-t-il une déclaration définissant, comme Clinton en son temps, les paramètres pour une solution du conflit? Ou se contentera-t-il de ne pas s’opposer à une éventuelle motion présentée au Conseil de sécurité? Ou soutiendra-t-il le projet français de conférence internationale s’il devait se confirmer? On peut s’attendre à ce qu’Obama ne veuille pas prendre le risque d’une initiative que son successeur soit obligé de dénoncer.
Dans tous les cas, il est certain que nous entrons dans une période d’instabilité. Par contre, nos fondamentaux restent stables. Le conflit ne sera résolu que le jour où une majorité des deux peuples en sera convaincue, et où elle poussera ses dirigeants à prendre les décisions difficiles. Devant le peu d’entrain de la classe politique israélienne à s’atteler aujourd’hui à cette question, la société civile reste la seule à se mobiliser, au travers de ses ONG, pour la mettre au cœur du débat public. C’est pourquoi nous avons invité à Paris Avi Buskila, le nouveau directeur de Shalom Arshav, et Yuval Rahamim, le directeur du Forum des ONG israéliennes pour la paix. Venez les rencontrer au cercle Bernard Lazare lundi 28 novembre à 20h30.
[1] Voir le sondage réalisé à la demande de JStreet montrant que 70 % des électeurs juifs ont voté pour Clinton.