Publié dans le n° 848 du mardi 4 octobre 2016.
La question de savoir si les Juifs de diaspora ont le droit de s’exprimer publiquement sur la politique israélienne agite régulièrement les Juifs de diaspora. Voici qu’elle réapparait dans la foulée de l’appel “Sauvez Israël” (à propos de la pétition SISO).
Que l’on soit de droite, de gauche ou du centre, personne n’ignore en diaspora qu’Israël est l’Etat du peuple juif, ni que tous les gouvernements israéliens n’ont cessé d’invoquer les droits et les intérêts du peuple juif. Et nous savons aussi que l’immense majorité des Juifs de diaspora reconnait la centralité d’Israël. Dans ces conditions, nous avons le droit légitime de nous exprimer. Bien entendu, il n’est pas question de se substituer au gouvernement israélien, émanation du libre choix de ses citoyens. Il s’agit d’exprimer une opinion, légitime en démocratie, sur un problème existentiel pour Israël et l’ensemble du peuple juif. L’écrivain A.B. Yehoshua, Prix Bialik et Prix Israël, avait déjà invité en 2004 les Juifs de diaspora à ne pas se murer dans le silence : « Il est juste et approprié que les Juifs en diaspora, angoissés par le destin et la situation d’Israël, se donnent le droit d’exprimer leur opinion sur la politique israélienne et essaient d’influencer démocratiquement le public israélien pour qu’il change de position ou pour soutenir telle ou telle orientation ».
C’est la raison pour laquelle nous répondons favorablement à cet appel qui nous est lancé par ces 500 personnalités israéliennes. Leur cause est notre cause et comme elles, nous avons le sentiment que l’occupation des Territoires palestiniens mine les fondements moraux et démocratiques de l’Etat d’Israël. C’est précisément parce que nous sommes inconditionnellement attachés à l’existence d’Israël que nous conditionnons notre soutien à ses gouvernements à l’aune des principes démocratiques en vigueur dans nos sociétés. Face aux dangers auxquels Israël est confronté, nous ne pouvons pas nous murer dans le silence, ni accepter sans sourciller des choix politiques qui risquent de transformer Israël en un Etat binational dans lequel les Juifs deviendront à terme une minorité.
Si nous souhaitons témoigner de notre solidarité à Israël, nous ne pouvons plus miser sur le statu quo actuel. Comme l’avait déclaré récemment notre ami, l’ambassadeur d’Israël, Elie Barnavi : « Il est temps de comprendre enfin : se débarrasser du fardeau des Territoires n’est pas une concession faite aux Palestiniens ; c’est une mesure de salut public pour les Israéliens ».
(1) “Regards” est la revue mensuelle du Centre Laïc Juif de Bruxelles (CCLJ David Susskind).