Plan Herzog : « Se séparer le plus vite possible des palestiniens »

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Itzhak Herzog, dirigeant de l’opposition parlementaire (1) au gouvernement Netanyahou , vient de dévoiler son nouveau plan diplomatique pour résoudre le conflit entre israéliens et palestiniens. Il l’a présenté par deux fois au cours de ces derniers jours : le 18 janvier 2016 à Tel-Aviv à l’occasion de la conférence annuelle de l’Institut National d’Etudes pour la Sécurité (INSS) ; le 22 janvier alors qu’il était reçu par François Hollande, président de la République française et par Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères.

Nous publions, ci-dessous, la traduction d’un article rédigé par Barak Ravid pour le quotidien israélien « Haaretz » et paru le 19 janvier dernier. Ce texte présente les principaux points du nouveau plan diplomatique et reprend les déclarations de Herzog à la conférence de l’INSS.

Une phrase caractérise le projet du leader de l’opposition : «La solution des deux Etats est impossible à réaliser dans les conditions actuelles, je souhaite que nous nous séparions le plus vite possible des palestiniens ». Herzog ajoute : «il faut achever la ceinture de sécurité qui entoure la Cisjordanie. Il faut se couper des villages palestiniens autour de Jérusalem».

Certains militants de la solution « deux peuples pour deux Etats », regretterons que le leader de l’opposition et chef du parti Travailliste propose une initiative unilatérale qui ne prévoit pas de négociations avec l’Autorité Palestinienne afin de mettre en place des solutions politiques partagées, ce qui aurait été une garantie de pérennité quant aux accords et une ouverture sur un véritable rapprochement des deux peuples. Ils ont beau jeu de rappeler que l’évacuation de Gaza en 2005, menée unilatéralement par Ariel Sharon, n’avait pas conduit à la paix, ou au moins à un cessez-le-feu, dans cette enclave palestinienne. Bien au contraire…

D’autres de ce camp se réjouiront qu’une initiative diplomatique soit enfin avancée par des dirigeants israéliens alors que, comme le souligne Itzhak Herzog, «la troisième intifada peut devenir une intifada plus cruelle que les précédentes, une intifada dans le style de Daesh». Ils constateront avec satisfaction que le leader de l’opposition s’inspire des accords de Genève (2) négociés entre palestiniens et israéliens en 2003. Pour les tenants du plan Herzog, il faut absolument sortir de l’immobilisme diplomatique actuel qui consacre l’occupation de la Cisjordanie, l’accroissement des implantations juives dans les territoires palestiniens et la permanence de la violence. A plusieurs reprises, de grandes figures du camp de la paix en Israël ont rappelé qu’à la Knesset (parlement) il existait une majorité de députés favorable à toute initiative gouvernementale qui encouragerait la cohabitation des deux Etats (Israël-Palestine).

 

Itzhak Herzog, député de la Knesset et leader de l’opposition (Union Sioniste) a déclaré, mardi 19 janvier à Tel-Aviv, que la solution des deux Etats était impossible à réaliser dans les conditions actuelles (3). Il a également présenté un nouveau plan diplomatique qui comprend une séparation entre les villages arabes de Jérusalem Est et le reste de la ville, parallèlement la barrière de sécurité qui entoure la Cisjordanie serait complétée, elle inclurait tous les blocs d’implantations.

Natanyahou  Israël doit se séparer de Netanyahu de sorte qu’il deviendra possible de se séparer des Palestiniens

«Je souhaite que nous nous séparions le plus vite possible du plus de palestiniens possible », a-t-il déclaré lors de son intervention à l’université de Tel-Aviv à l’occasion d’une conférence annuelle organisée par l’INSS. «Ils seront là-bas et nous serons ici, nous allons ériger un grand mur entre eux et nous. C’est le seul genre de coexistence qui est possible maintenant. Nous existerons de ce côté et ils existeront de l’autre côté. Ariel Sharon a fait le bon choix quand il a édifié la barrière de sécurité qui a empêché les infiltrations des terroristes kamikazes, mais il n’a pas fini le travail. Nous voulons l’achever, compléter la barrière qui nous sépare. Nous appelons cela la mise en place d’une ligne de sécurité, la ligne rouge. Israël doit se séparer de Netanyahu de sorte qu’il deviendra possible de se séparer des Palestiniens».

Herzog a affirmé qu’Israël et les palestiniens sont au milieu d’une troisième intifada. «Si nous continuons à dénier la vérité cela peut devenir une intifada qui pourrait devenir plus cruelle que les précédentes, une intifada dans le style de Daesh. Mais ici (en Israël) les gens sont encore en train de rêver», a-t-il constaté. «Deux nations avec une profonde conscience nationale, chacune réclamant la même terre, ne pourront jamais vivre en paix dans un seul Etat. Le cauchemar vers lequel Netanyahou nous mène, en gérant à sa manière le conflit, nous explosera au visage et poignarde chacun d’entre nous».

Le leader de l’opposition rappelle qu’il a averti le Premier ministre ainsi que le Président palestinien, Mahmoud Abbas, qu’une troisième intifada était imminente. «Je n’ai pas rencontré une oreille attentive de la part de Netanyahou, pas plus que de la part de Mahmoud Abbas. C’est pour cette raison que les citoyens d’Israël se trouvent désormais en situation d’insécurité permanente. Ces deux responsables politiques n’ont pas la carrure, la force ou le courage de négocier de vrais compromis. C’est un effet en miroir des deux côtés de la barrière : deux dirigeants effrayés et paniqués qui veulent se maintenir au pouvoir, deux dirigeants paralysés par la peur ».

Aucune démarche géographique ou politique qui pourrait mettre en péril la solution « deux peuples, deux Etats ».

Herzog a souligné qu’il n’y aurait pas de progrès sous le gouvernement de Netanyahou car celui-ci a «signé un pacte avec l’extrême droite ». Le leader de l’opposition a ajouté qu’après les dernières élections il a envisagé la possibilité de mettre en place un gouvernement d’unité nationale avec Netanyahou «mais Bibi était effrayé de faire le moindre mouvement et s’il a peur de bouger, je ne vois rien que je puisse faire avec lui. Bibi ne veut pas s’occuper de sécurité, nous restaurerons la sécurité. Il ne veut pas se séparer des palestiniens, nous le ferons. Nous ne voulons pas nous imposer à eux. Nous ne voulons pas annexer la Judée et la Samarie et donner le droit au retour à trois millions de palestiniens. C’est ce que veut l’extrême droite, y compris les députés du Likoud Elkin, Levin et Hotovely. Netanyahou est trop faible pour s’opposer à eux ou les arrêter.»

Drapeaux Israel Palestine face à face  Les propositions du plan Herzog :

– Réalité de la solution des deux Etats. Dans les conditions actuelles sa mise en place est impossible. Cependant, Israël s’engage à n’effectuer aucune démarche géographique ou politique qui pourrait mettre en péril cette solution.

– Mesures sécuritaires contre le Hamas. «Il n’y aura pas d’immunité et pour chaque attaque il y aura de lourdes rétorsions…Nous agirons d’une main de fer efficace et nous éliminerons leurs stations de radio et de télévision. Suite à ces opérations ils n’auront plus d’Internet ni de téléphonie mobile et les terroristes ne pourront plus transmettre leurs instructions. Nous allons prendre des mesures difficiles et graves, y compris celles visant leurs dirigeants».

– Achèvement de la barrière de sécurité en Cisjordanie. «Celle-ci permettra de prévenir les attaques sur les blocs d’implantations qui resteront en notre possession », explique Herzog. «La situation sera claire pour chacun. Les israéliens d’un côté, les palestiniens de l’autre. Les blocs d’implantation placés sous souveraineté israélienne le seront définitivement. Ils permettront de recevoir les habitants de Judée et Samarie qui habitent en dehors de ces grands blocs».

– Séparer les villages palestiniens de Jérusalem. Herzog a précisé que son plan diplomatique prévoit l’achèvement complet de la barrière de sécurité autour de Jérusalem de telle manière que les villages palestiniens voisins de la ville soient situés de l’autre côté de cette barrière. «Alors, nous aurons vraiment unifié Jérusalem sans les milliers de palestiniens qui demeureront de l’autre bord de la barrière » a-t-il déclaré. « Issawiya (4) n’est pas et ne fera pas partie de la capitale éternelle d’Israël. Pas plus que le camp de réfugiés de Shoafat (4)… Les terroristes ne pourront plus s’en prendre aux Juifs et ceux qui veulent vivre avec nous en paix pourront circuler en Israël compte tenu des circonstances de sécurité ».

– Mesures destinées à renforcer la confiance avec les palestiniens. «Les palestiniens seront totalement libres de la gestion des domaines civils, ce qui ne sera pas le cas des questions militaires qui demeureront sous autorité israélienne. Ils pourront construire des villes, agrandir celles qui existent, développer l’agriculture, l’industrie, les emplois ». Herzog prévoit que l’armée israélienne continuera à contrôler la Cisjordanie dans le but de prévenir les actions terroristes. « L’armée israélienne maintiendra sa présence dans la vallée du Jourdain. Après quelques années, si la situation sécuritaire est calme, nous pourrons envisager de nouveaux scénarios pour l’avenir », a-t-il indiqué.

– Convocation d’une conférence sur la sécurité régionale avec la participation des pays arabes modérés. «Une telle conférence pourrait changer la situation dans la région », a constaté Herzog. «Ensemble, nous pourrions construire un front contre la terreur islamique au Moyen-Orient. Notre nouveau plan diplomatique de séparation avec les palestiniens fait intégralement partie de cette initiative sécuritaire régionale».

NOTES

(1) L’Union sioniste (en hébreu : המחנה הציוני) est une coalition politique israélienne créée à l’occasion des élections législatives israéliennes de 2015. Ses principales composantes sont le Parti travailliste (Herzog) et la liste Hatnuah (Livni). L’Union sioniste compte 24 députés sur 120 (le Likoud 30) depuis les dernières élections de 2015 à la Knesset.

(2) Cliquer ici pour connaître l’ensemble des dispositions des Accords de Genève (site JCall)

(3) Cliquer ici pour lire un article du journal « Le Monde » sur les difficultés de l’Autorité Palestinienne et du président Abbas.

(4) Issawiya est un village palestinien et Shoafat un camp de réfugiés. Les deux sont contigus à Jérusalem Est. Plusieurs de leurs habitants ont été impliqués récemment dans des actes de terrorisme.

Traduction et présentation : Paul Ouzi Meyerson
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