Gilad Shalit, une libération riche en enseignements

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18 octobre 2011 à 12:07

TRIBUNE Le gouvernement israélien comme le Hamas sont capables de discuter et négocier avec l’ennemi, moyennant des intermédiaires adéquats et une réelle volonté politique.

Après 1941 jours de séquestration, sans aucun contact avec l’extérieur, Gilad Shalit va enfin pouvoir rentrer chez lui. Il est attendu par tout un pays pour lequel il est devenu, grâce à l’inlassable et admirable combat de ses parents, l’enfant de chaque famille.

Beaucoup d’analystes ont déjà décrypté les raisons qui ont poussé les deux parties à modérer leurs exigences et accepter un accord qu’ils avaient refusé jusqu’à présent:

– L’influence des bouleversements régionaux suite au printemps arabe : Le Hamas choisissant le Caire contre Damas était plus sensible aux pressions du nouveau régime égyptien. De plus, la perspective de voir les frères musulmans associés au futur pouvoir fait de l’Egypte un allié potentiel important pour l’organisation islamiste. Alors qu’Israël pouvait craindre, compte tenu des changements en cours, de voir s’étioler dans le futur le soutien égyptien indispensable à cette négociation.

– La popularité d’Abbas dans la rue palestinienne suite à son discours à l’ONU a poussé le Hamas à montrer qu’il réussissait, lui, grâce à ses méthodes à faire plier l’ennemi et obtenir la libération de prisonniers. En privilégiant maintenant la diplomatie, il veut ainsi revenir dans la grande famille palestinienne et gagner le soutien de ses frères sunnites au moment où l’Iran ne le finance plus.

– Netanyahou, de son côté, confronté, sur la scène internationale, à l’isolement croissant d’Israël et à la détérioration de ses positions suite à l’incapacité de son gouvernement de négocier avec l’Autorité palestinienne et, sur le plan intérieur, à un mouvement social d’une ampleur sans précédent, était contraint de prendre une initiative pour renforcer sa position vis-à-vis d’une opinion, prête en grande majorité à payer le prix d’un accord pour libérer Guilad Shalit.

De nouveaux espoirs

 

Tous ces arguments ont sans doute joué. Mais je voudrais tirer d’autres enseignements de cet échange qui me semblent porteurs d’espoir et d’indications importantes pour d’éventuelles futures négociations.

 

Tout d’abord cet accord a prouvé que, contrairement à leurs proclamations, le gouvernement israélien comme le Hamas sont capables de discuter et négocier, certes via des intermédiaires, avec l’ennemi honni. Cela montre que chacun peut faire preuve de pragmatisme et faire des compromis avec ses principes quand il y trouve son compte.

 

Pour le gouvernement israélien, la décision n’a pas été facile à prendre. Il s’agissait d’accepter la libération de plus de 1000 prisonniers dont plus de 280 ont été condamnés à la perpétuité pour des attentats qui ont causé la mort de près de 600 civils israéliens.

Pour la nation israélienne, c’est assumer le risque que certains de ces prisonniers reviennent à des activités de terrorisme, comme le montrent les statistiques portant sur les échanges précédents (60 % d’entre eux étaient retournés à leurs activités et 15 % en prison).

Mais une telle décision est aussi la preuve qu’une décision, certes douloureuse, peut être prise si elle est portée par une volonté politique et accompagnée par un soutien populaire, y compris par un gouvernement de droite comme celui de Netanyahou qui a montré, là, sa capacité de leadership.

Il faut profiter de cette dynamique

 

L’autre leçon concerne l’identité des différents médiateurs qui ont permis cet accord. Il n’est pas étonnant que ce soit un tandem de négociateurs allemands et égyptiens qui soient intervenus.

L’Allemagne, compte tenu de son histoire qui lui confère une responsabilité particulière, est reconnue comme un allié sincère par Israël, tout en étant écoutée dans le monde arabe. Les Allemands ont déjà servi d’intermédiaires lors de précédents échanges de prisonniers entre Israël et le Hezbollah.

L’Egypte, quant à elle, reste le pays arabe le plus important vers lequel tous les yeux du monde arabe sont tournés depuis la chute de Moubarak, et cela bien que le nouveau régime ait confirmé son engagement à préserver l’accord de paix avec Israël.

Enfin le rôle joué par Gershon Baskin, le codirecteur de l’IPCRI, une ONG israélo-palestinienne militant pour la paix, qui a servi d’intermédiaire entre David Meidan, chargé par Netanyahou du dossier Shalit, et des officiels du Hamas, montre le rôle que peuvent jouer des militants qui ont gagné par leur engagement la confiance des deux parties.

 

Depuis plus de cinq ans, la séquestration de Guilad Shalit a constitué pour beaucoup d’Israéliens un véritable blocage mental, justifiant à leurs yeux une politique répressive à l’encontre de la population gazaouie.

Cet obstacle maintenant levé et alors qu’Israël se prépare à vivre des jours intenses d’euphorie, renouant avec ses valeurs de solidarité nationale, et que le Hamas saura faire valoir son succès, il faut profiter de cette dynamique pour relancer les négociations et donner des gages à Abbas lui permettant de faire contrepoids à la popularité dont bénéficiera le Hamas dans la rue palestinienne. Aux Européens de jouer leur rôle au sein du quartette pour être les moteurs de ce mouvement.

http://www.liberation.fr/monde/01012366356-gilad-shalit-une-liberation-riche-d-enseignements

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